
On continue notre tour d’horizon de cette rentrée littéraire avec un OLNI (Objet Littéraire Non Identifié) que je suis très heureux d’avoir l’occasion de vous présenter. Je garde toujours un œil sur la production très intéressante des Forges de Vulcain, en particulier dans le domaine des littératures de l’imaginaire. Mais avec « Chinatown intérieur », changement de registre, préparez-vous à une plongée dans le réel.
Willis Wu est un citoyen américain d’origine asiatique qui tente tant bien que mal de trouver sa place dans une société monochrome, plaçant les Noirs d’un côté et les Blancs de l’autre. Une société qui voudrait, lui comme tous ses congénères, le cantonner dans un rôle d’asiat’ de service, lui qui rêve de devenir ce Mister Kung Fu qu’il a vu à l’écran dans sa jeunesse. Parviendra-t-il malgré tout à trouver sa place ?
« Chinatown intérieur » est un livre très original composé comme le script d’un scénario de film. Il donne l’impression que le héros désireux de percer dans le domaine du cinéma vit sa vie comme un film dont il aurait obtenu le rôle principal. Tour à tour film d’action (le fameux kung-fu), enquête policière ou encore comédie romantique, le livre mélange les genres et donne le vertige au lecteur qui ne sait plus trop à quel niveau de réalité il se trouve. Mais la forme ne serait rien sans le fond. L’odyssée de Willis, et à travers lui celle de son entourage, tour à tour drôle et triste, nous emporte par son émotion. Et en même temps elle nous fait réfléchir à la place laissée à la communauté asiatique en Amérique et à son intégration difficile au rêve américain, entre noir et blanc.
Un très beau livre à la construction brillante qui nous fait réfléchir sur les notions d’identité, d’intégration et d’assimilation.
Vous avez aimé ? Maintenant que vous êtes accoutumés à cette écriture façon script, pourquoi ne pas en profiter pour découvrir les dialogues complets du film culte de Michel Hazanavicius et Dominique Mézerette dans « La classe américaine » ?
« Chinatown intérieur », Charles Yu, Aux Forges de Vulcain, 274 pages.
