
Le Tout est la firme la plus puissante et prospère au monde. Entreprise tentaculaire née de la fusion du Cercle, détenteur mondial des réseaux sociaux, avec un géant du commerce en ligne, elle a pour objectif de prendre le contrôle de nos cerveaux à coups de nouvelles technologies aliénantes. La jeune Delaney Wells grandit dans ce monde anxiogène et se promet dès son enfance de renverser un jour le maléfique Tout. Delaney parvient à s’y faire embaucher et se retrouve ainsi au cœur de son réacteur. Elle se met alors à concevoir pour le Tout les applications les plus infâmes possible, espérant que la population se révolte enfin. Mais le monde est-il encore assez lucide pour voir la vérité en face ?
« Le Tout » dénonce les dérives déjà à l’œuvre dans le domaine des nouvelles technologies. L’évolution que propose Dave Eggers est particulièrement plausible si l’on continue à pousser le curseur de plus en plus loin. En ce sens, le livre fait froid dans le dos en même temps qu’il nous donne le vertige en montrant le rognement des libertés individuelles, toujours pour de bonnes et louables raisons, comme la somme de tous nos petits renoncements. La société portée par le Tout apparaît dictée par les algorithmes et l’autocensure, marquée par le règne de la réputation et du regard des autres. Le roman n’est heureusement pas dénué d’une pointe bienvenue d’humour. Le résultat est très prenant et ne manque pas de nous faire réfléchir à nos comportements individuels et collectifs.
« Le Tout », Dave Eggers, Gallimard, 640 pages.
