
Aujourd’hui est l’occasion pour moi de vous présenter une petite maison d’édition, Ginkgo éditeur. Son objectif, faire découvrir par leurs livres des régions ou des pays ainsi que ceux qui les peuplent, mais aussi d’aborder leur histoire sous l’angle de destins individuels, par des témoignages d’écrivains, d’historiens ou de simples anonymes. C’est l’occasion de voyager du 17ème siècle à nos jours à travers les cinq continents.
« Cœur de chien » nous emmène en 1924 à Moscou. Filip Filippovitch Preobrajenski est un chirurgien de grande renommée spécialisé dans les opérations les plus complexes, qu’il pratique désormais à son domicile. Les recherches qu’il réalise l’amènent un jour à recueillir Boule, un chien errant et à lui greffer l’hypophyse et les testicules d’un homme récemment décédé pour tester l’effet de ces organes sur le rajeunissement de l’organisme. Mais cette opération va avoir de curieux effets secondaires car le chien va petit à petit se transformer en homme. Et pas n’importe quel homme puisqu’il s’avère grossier, ingérable et influençable du point de vue des idées politiques. Pour un chirurgien déjà harcelé par les comités soviétiques, la situation va s’avérer pour le moins compliquée.
J’ai commencé la lecture de « Cœur de chien » sur les (bonnes) recommandations de l’éditeur, sans connaitre quoi que ce soit sur son sujet. Du coup, j’ai forcément été un peu surpris au moment de l’opération du chien Boule quand la nouvelle de Boulgakov a pris sa tonalité résolument fantastique. Mais le résultat est très intéressant à lire et constitue une critique à peine voilée du système soviétique et de sa vision de l’homme nouveau. Si personne ne semble s’étonner de la transformation de Boule en Boulov, c’est surtout son atavisme qui frappe, puisque créé à partir des organes d’un « camarade » vulgaire et grossier, il le devient lui même petit à petit. D’ailleurs, le livre a très longtemps été censuré en URSS car jugé contre-révolutionnaire. Il n’a été publié là-bas qu’en 1987. Sur sa forme, « cœur de chien » se révèle très original, notamment dans toute sa partie adoptant le point de vue du chien Boule, et drôle. Mélange de fantastique, d’irrationnel et de dérision, il met à mal les tenants des institutions et de la bureaucratie soviétiques, qui vont même jusqu’à tenter de faire lire Engels à Boulov.
Une passionnante plongée dans la société soviétique du début des années 1920 !
Vous avez aimé ? Outre les autres titres de littérature russe proposés par l’éditeur, vous pouvez découvrir « Le maître et Marguerite », grand classique de Boulgakov.
« Cœur de chien », Mikhaïl Boulgakov, Ginkgo éditeur, 187 pages.
