« L’abolition des privilèges », Bertrand Guillot

Parmi les ouvrages reçus dans le cadre du prix Orange du livre 2022, voici un ouvrage assez atypique puisqu’il flirte avec le livre d’histoire. A tel point que je viens de vérifier les conditions de sélection pour le prix afin de vérifier qu’il était bien exigible et que je pouvais effectivement le défendre. Malgré tout, il se situe plutôt dans le domaine du roman historique, même si en très grande fondé sur du réel et un important travail d’archives ! 


C’est un Etat en déficit chronique, ou les plus riches échappent à l’impôt. Un régime à bout de souffle. Un peuple à bout de nerfs, qui réclame justice et ne voit rien venir. Un pays riche mais bloqué, en proie aux caprices d’un climat déréglé. Telle est la France a l’été 1789. Jusqu’à ce qu’en une nuit, à Versailles, tout bascule. C’est la Nuit du 4 août.  


« L’abolition des privilèges » est un récit très vivant des évènements de la nuit du 4 août 1789. S’il est nourri par l’imposant travail sur les archives d’époque de l’auteur, il n’en est pas moins très clair et accessible. Il est écrit dans une langue parfois familière et truffée de mise en perspective des réalités historiques de l’époque avec notre propre grille de décodage contemporaine. L’auteur se situe au-delà du récit stricto sensu des évènements successifs qui ont abouti à cette abolition pure et simple des privilèges. En effet, avec le recul, on peut avoir l’impression que les privilèges de la noblesse et du clergé devaient forcément tomber, que leur disparition était dans l’ère du temps, comme un des éléments impératifs de la révolution. Pourtant, en lisant ce livre, on se rend compte qu’il n’en est rien et qu’elle ne figure même pas dans les cahiers de doléances. Au contraire, elle est le fruit d’un ensemble de circonstances et d’une convergence difficile à imaginer à l’époque. C’est toute la force de Bertrand Guillot de parvenir à totalement déconstruire la chaîne d’évènements, de décisions et même de ressorts psychologiques qui ont permis d’aboutir à ce résultat.  


Un livre qui trouve un écho contemporain intéressant dans la persistance de certaines privilèges actuels et les difficultés à réformer ou faire valoir une autre manière de vivre ou de fonctionner collectivement. Une superbe lecture !

« L’abolition des privilèges », Bertrand Guillot, Les Avrils, 256 pages.

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