Après une petite pause ces derniers jours, nous reprenons aujourd’hui notre découverte des 20 titres de la sélection du prix Orange du livre 2022. J’espère avoir le temps de tous vous les présenter avant la deuxième délibération le 18 mai prochain.

Suis-je passé à côté de ma vie ? C’est la question qui éclabousse Paul lorsque, le jour de son mariage, il retrouve Joseph, un ami perdu de vue depuis vingt ans. Et c’est l’été 1983 qui ressurgit soudain. Celui des débuts flamboyants et des premiers renoncements. Avant que la violence des autres fonde sur lui et bouleverse à jamais son existence et celle des siens.

« Les ailes collées » est un très joli roman. Sa première partie, avec ce jeune garçon qui tente, tant bien que mal, de grandir dans un environnement familial plus que difficile, est très réussie. Le lecteur ne peut que s’attacher à ce garçon qui semble cumuler bien des handicaps pour bien grandir, en particulier des liens familiaux pour le moins compliqués, entre un père absent et une mère dépressive. La révélation de son attirance pour son ami Joseph et la vague de harcèlement à l’école qui va s’ensuivre en constituera l’apogée. L’autrice parvient superbement à retranscrire les états d’âme et les questionnements, en même temps que la force des sentiments contradictoires qui peuvent envahir Paul. La deuxième partie, qui suit le héros à partir de son mariage, est un peu plus poussive, dotée de quelques longueurs, avec un garçon devenu un homme assez crispant dans ses réactions, ou plutôt ses non réactions et sa capacité à subir les évènements. Pour autant, le roman constitue un très beau texte sur l’homosexualité et les difficultés de son acceptation, à tous les niveaux. C’est également le roman de la résilience, avec des enfants capables de tirer un trait sur leurs griefs envers leurs parents pour mieux avancer et construire leurs vies.

« Les ailes collées », Sophie de Baere, Lattès, 384 pages.